L'Union européenne et Chypre: autopsie d'un succès inachevé( Télécharger le fichier original )par Meriem JAMMALI Université Paris IV Sorbonne - Master Enjeux, conflits, systèmes internatinaux à l'époque moderne et contemporaine 2006 |
II. La GrèceDès les années 50, la Grèce fait de l'Enosis de Chypre une priorité dans sa politique régionale. Cependant, à cause de la situation internationale et ses obligations multiples sur le plan national, elle est incapable d'agir efficacement pour un rattachement immédiat. Faute de moyens, Athènes se résigne à soutenir ouvertement la guérilla menée sur deux fronts : le front politique par Makarios et le front militaire par le Colonel Grivas et son EOKA. L'Eglise grecque et chypriote autocéphale joue un grand rôle. Dimitri T. Analis décrit la volonté grecque d'intégrer chypre comme étant « la passion, le romantisme et toutes sortes d'exaltations »55(*). Il s'agit des vestiges de la « Grande Idée », écrit-il. En 1951, la Grèce chercha l'appui de l'ONU, mais en vain. Faudrait-il rappeler que les institutions onusiennes sont sous influence occidentale ? Cependant, pour les puissances occidentales, il n'est pas question de prendre position ni pour la Grèce ni pour la Grande-Bretagne ou encore la Turquie. La guerre froide ajoute encore une autre contribution au statu quo de l'île : la Grèce est incapable de protéger une telle base aussi vitale pour la défense des pays occidentaux et ne pouvait dès lors compter sur leur appui. En effet, le combat grec pour inscrire la question chypriote à l'ONU n'a pas porté ses fruits et la Grèce se trouve prisonnière des enjeux régionaux et internationaux. Elle le reste jusqu'à nos jours. Emportée par la ferveur de ses revendications, la Grèce se perd en chemin et fait abstraction du facteur turc qui occupe une partie de l'île. En effet, Athènes trouve inadmissibles et exorbitantes les concessions qu'elle devrait consentir : droit de veto au vice-président turc, participation de la communauté turque à 30% dans l'administration et à 40% dans l'armée. A partir de 1974, tous les gouvernements grecs quelle que soit leur orientation idéologique ou la spécificité de leur approche de la politique étrangère, ont développé un large consensus concernant le danger turc et la question chypriote a pris une signification symbolique particulière. Cependant, la relation entre Athènes et Nicosie est parfois verticale. Athènes « le grand frère » ne cesse d'affirmer son rôle de protecteur des intérêts chypriotes. Si la « Nouvelle démocratie » de 1974 à 1981 en Grèce se contentait de soutenir les actions de Nicosie et lui laisser une grande marge de manoeuvre, l'avènement en 1981 au pouvoir du parti socialiste « PASOK » a marqué la volonté du gouvernement grec de réaffirmer sa primauté sur celui de Nicosie. Cette attitude a crée des protestations des Chypriotes grecs. Les années 90 et particulièrement après la candidature chypriote à l'Union européenne, marquent la normalisation des relations Athènes - Nicosie. En effet, le gouvernement grec a milité et utilisé toutes sortes de menaces et pressions afin que Chypre rejoigne l'UE56(*). * 55 ANALIS ( D), Chypre, opération Attila, Anthropos, Paris, 1978, p. 150. * 56 Cf. à la troisième partie de ce travail. |
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