L'Union européenne et Chypre: autopsie d'un succès inachevé( Télécharger le fichier original )par Meriem JAMMALI Université Paris IV Sorbonne - Master Enjeux, conflits, systèmes internatinaux à l'époque moderne et contemporaine 2006 |
5. Chypre : vers deux EtatsLa zone turque ainsi formée se proclame en 1975 « Etat fédéré turc de Chypre ». Denktash et Makarios se mettent d'accord pour que l'île soit bicommunautaire, bizonale. Cet accord est parachevé en 1979. En septembre 1980, les généraux ont pris le pouvoir à Ankara51(*). Denktash profite de la situation et annonce en novembre 1983 l'établissement de « la République turque de Chypre du Nord » (RTCN) qui n'est reconnue que par la Turquie. La communauté internationale, par le biais des résolutions 541 de 1983 et 550 de 198452(*) a condamné cette action unilatérale de Rauf Denktash et a déclaré illégale et invalide une telle violation de la Constitution chypriote. Par conséquent, aucun Etat n'a reconnu la nouvelle autorité chypriote turque. A ce propos, il importe de souligner que la Turquie a vainement cherché le soutien auprès des pays arabo-musulmans comme la Libye, la Tunisie et le Pakistan. La ligne « verte » est devenue une frontière hermétique traversant toute l'île par le centre de Nicosie. La partie sud, grecque, s'est relevée rapidement grâce à la reconnaissance internationale et à la promotion du tourisme, tandis que la partie nord, reconnue par la seule Turquie subit l'embargo des autres pays et les soubresauts de l'économie turque. 6. A la recherche d'une solutionDès 1964, les Nations unies ont envoyé leurs forces (UNFCYP). Elles ont cherché, dans le cadre des missions de bons offices, à promouvoir le dialogue entre les deux communautés dans la perspective d'un règlement définitif. Des négociations interminables qui s'appuient sur les deux accords qualifiés de haut niveau de février 1977 et de mai 1979 ont été initiées. Le premier accord signé entre le président Makarios et Rauf denktash établit le « guideline » pour les négociations. Il stipule que l'objectif ultime est d'instaurer un Etat indépendant, non-aligné et une république fédérale bicommunautaire. Les pouvoirs seraient confiés au gouvernement fédéral afin de sauvegarder l'unité de l'île tout en respectant son caractère bicommunautaire. Le deuxième accord signé entre le président S. Kyprianou et R. Denktash en 1979 va plus loin en incluant la clause du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales de tous les citoyens, la démilitarisation de l'île en vue de protéger la souveraineté et l'intégrité territoriale de Chypre et enfin en chercher un accord pour la réinstallation des réfugiés Chypriotes grecs à Varosha. Cependant, ces accords historiques se sont heurtés à l'intransigeance turque. Depuis, les Nations unies sont impuissantes face à cette impasse diplomatique. Tout au long de ces années et jusqu'à l'adhésion de la partie sud à l'UE, on assiste au même scénario qui traduit parfaitement l'insolvabilité de la « tragédie chypriote ». A bien des égards, l'histoire de l'île explique les antagonismes intenses qui y règnent. Une décolonisation empoisonnée a dressé l'une contre l'autre deux communautés - grecque et turque - qui vivaient ensemble depuis des siècles, jusqu'à aboutir à un véritable « nettoyage ethnique » par le jeu des expulsions et la partition de facto de l'île. Depuis, les Nations unies auront consacré une vingtaine de résolutions à Chypre, pomme de discorde dangereuse entre la Grèce et la Turquie, deux pays membres de l'OTAN. Sur le terrain, les intimidations militaires sont plus que monnaie courante, avec régulièrement des morts le long de la « ligne verte » qui divise l'île, placée sous protection des soldats de l'ONU. * 51 En septembre 1980, la Turquie connaît un nouveau coup d'état militaire suivi d'une forte répression. Tous les partis sont dissous (surtout l'extrême-gauche et l'extrême droite). Les militaires occupent les nouvelles organisations politiques turques et mettent en place un conseil national de sécurité sous l'égide de Turgut Özal qui essaye par la suite de concilier la nature démocratique du régime, les principes fondateurs de l'islam et essaye de donner une issue culturelle au problème kurde. * 52 Voir Annexe IV : Résolution de l'Onu relative à l'autoproclamation de la RTCN. |
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