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Thomas Sankara et la condition féminine: un discours révolutionnaire?

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par Poussi SAWADOGO
Université de Ouagadougou - Maà®trise sciences et techniques de l'information et de la communication 1999
  

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LE STATUT DE LA FEMME AU BURKINA FASO

DE LA SOCIETE PRECOLONIALE A LA REVOLUTION SANKARISTE.

CHAPITRE I.

LE STATUT FÉMININ DANS L'HISTOIRE DE LA HAUTE-VOLTA.

Comme l'ensemble des femmes africaines, la femme voltaïque connaît des conditions de vie qui sont tributaires de l'évolution historiques.

1.1 FEMME BURKINABÉ ET SOCIÉTÉ PRÉCOLONIALE

Les régions de la Haute-Volta avant la colonisation, pratiquaient essentiellement l'agriculture.

Cette dernière était une production domestique consacrée aux céréales dans les zones de savane et aux tubercules dans les régions plus humides. La femme ne se présentait que comme un élément de la famille :elle n'avait pas d'existence en dehors de celle-ci. La terre exploitée le plus souvent par les femmes et les jeunes relevaient du patrimoine de la famille, au sens large du terme. La famille avait une valeur sociale et économique. Unité de production, elle atteignait un remarquable stade d'autonomie et d'autosubsistance. C'est la raison pour laquelle la famille devait produire elle-même les agents de production. Ce besoin expliquait la polygamie. Elle se justifiait par le rôle à double dimension que devait jouer la femme : agent de production elle-même et agent de reproduction de main-d'oeuvre.

La femme précoloniale, comme tous les membres de la société, devait un strict respect aux règles. La religion vécue comme un besoin d'ordre, de paix et de sécurité recommandait le respect de la loi des ancêtres et de la hiérarchie sociale. Les sujets, les cadets, les enfants et les femmes devaient se soumettre et obéir scrupuleusement, respectivement, au roi, aux aînés, aux parents et aux maris. Dans ce système hiérarchisé, la femme n'avait aucun rôle politique. Aristote n'abondait-il pas dans le même sens lorsqu'il analysait le fonctionnement de la famille ? «Cette association (la famille) implique une hiérarchie naturelle : La nature a formé l'homme, qui possède plus d'intelligence pour commander, la femme, l'enfant, l'esclave pour obéir ». La femme occupait une place marginale dans le Moogo. Elle ne jouissait d'aucun droit. Donnée en mariage par ses parents, elle devenait un élément du patrimoine de son époux. Elle intervenait néanmoins dans les rites à caractère religieux. En effet, la première femme (Pug-keema) gardait dans sa case les fétiches familiaux du mari18(*).

Dans la société moaaga, les vieilles femmes pouvaient donner leurs avis. La première femme du chef (Pug-keema) jouait le rôle de conseillère discrète. Elle était membre du jury du système judiciaire. C'est à elle que revenait la présidence du harem royal grâce à son rang de conseillère dans les affaires coutumières et religieuses. La coutume réservait une place fondamentale à la fille aînée du roi (Napoko). Elle assurait l'inter -règne à la mort de son père19(*).

En fait, la situation de la femme moaaga n'était pas celle d'une esclave. L'épouse représentait un pilier commun de toute la famille et tous les membres lui devaient respect. Cependant, elle devait en retour se conformer à des vertus notamment l'obéissance, la soumission et la fidélité absolues20(*). Cette autonomie relative n'était pas aperçue par le visiteur du pays moaaga. Ainsi l'explorateur Binger tirait, en 1887, de ce que le prince Boukary Koutou lui donna trois jeunes filles en mariage en lieu de cadeau de bienvenue, l'idée que la femme était considérée comme un objet de transaction, un bien de consommation. Une fois entre les mains des hommes de Binger, ces pauvres femmes renoncèrent à leur liberté et firent preuve d'une docilité exemplaire. L'explorateur interprétait ainsi leur attitude : « Décemment vêtues et relativement bien nourries, elles n'en demandaient pas davantage. Elles ont très bien compris que nos hommes ne les traiteraient pas, comme, cela a eu lieu par ici, comme des bêtes de somme, des brutes ou des animaux de production »21(*).

La femme contribuait énormément à l'économie du ménage par la culture du champ collectif, le travail de son lopin de terre personnel, les tâches domestiques (ménage, filage de coton) et le commerce de soumbala (arôme traditionnel), du beurre de karité, des céréales et des produits artisanaux22(*) (poterie, vannerie).

En somme, la femme moaaga connaissait une condition d'infériorité très marquée. Son seul luxe, toléré par son mari, se limitait à porter des anneaux ou des bracelets dont elle se paraît les jambes et les bras. Elle devait un respect scrupuleux à tout homme. « La femme salue et ne parle pas à qui que ce soit sans se prosterner et se tenir les joues avec les paumes des mains tournées en dehors, les coudes touchant terre »23(*).

Cependant quelques femmes se montrèrent dignes de gouverner avant la période coloniale dans certaines sociétés traditionnelles, telle la princesse Guimbé Ouattara qui fut une femme remarquable, Née vers 1836 à Bobo-Dioulasso, elle eut une grande influence sur le plan local. Refusant de se plier à la dictature de son époux, malgré un mariage précoce à quinze ans24(*), elle subit des châtiments corporels dont elle conserva les marques bien visibles au front et près du nez. Elle détenait des esclaves et des hommes d'armes qu'elle prêtait dans les expéditions guerrières, ce qui lui procurait des revenus substantiels25(*). Guimbé Ouattara s'illustra aussi comme la protectrice d'explorateurs, tels que Binger, Crozat et Monteil. Reconnaissante, l'administration coloniale songea à lui confier la direction de certains cantons de Bobo-Dioulasso. Cependant, son cousin Dafogo Ouattara s'y opposa sous le prétexte qu' « une femme, selon lui, ne pouvait pas commander dans leur pays ». C'est dire la limite donnée au pouvoir politique des femmes dans la société précoloniale.

* 18 KABORE (V-F), Condition et place de la femme dans la société moaga traditionnelle de Ouagadougou. Ruptures et permanences avec l'avènement de l'islam, Mémoire de maîtrise, INSHUS-U.O, Département d'Histoire et Archéologie, 1989, p. 34.

* 19 KABORE (V-F), op. cit., p. 32.

* 20 KABORE (V-F), op. cit., p. 31.

* 21 BINGER (L G), Du Niger au Golfe de Guinée par le pays de Kong et le Mossi,. Paris, Hachette, 1892, p. 473.

* 22 BINGER (L G), op. cit., pp. 39-40.

* 23 BINGER (L G), op. cit., p. 495.

* 24 « L'histoire du Burkina depuis la fin du XIXe siècle », EURÊKA n 19, Décembre 1996, p 28

* 25 « L'histoire du Burkina depuis la fin du XIXe siècle », EURÊKA n 19, Décembre 1996, p 28

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams