La fraude à la TVA( Télécharger le fichier original )par Nicolas Mathe Université Toulouse 1 Capitole - Master 2 droit fondamental des affaires 2011 |
Chapitre 2 : Les différentes formes de fraude à la TVA87. Il existe différentes formes de fraude à la TVA que l'on peut regrouper en trois catégories : Les fraudes à la TVA dites « classiques », les fraudes constituées par des circuits de fausses factures, et enfin les fraude Carrousels. 88. La fraude à la TVA « classique » se nomme ainsi car elle existe depuis la création de la TVA, et se retrouve dans tous les pays utilisant ce type de taxe122(*). L'objectif est d'éluder le paiement de ce qui est dû à l'Etat. Elle concerne en général des petits montants, et résulte de « l'omission » de déclaration de certaines opérations commerciales. Bien qu'elles soient très rependues, ces formes de fraudes « classiques à la TVA » (Section 1) ne correspondent qu'a une petite proportion du montant global de la fraude à la TVA. La plus grande part de ce montant est constituée par des formes de fraude plus rares mais bien plus lucratives. Il est donc plus opportun de se pencher un peu plus sur l'étude des fraudes constituées par des circuits de fausses factures (Section 2), et sur l'analyse de la fraude Carrousel (Section 3). Section 1 : Les formes « classiques » de la fraude à la TVA89. Les formes « classiques » de la fraude à la TVA sont les fraudes les plus répandues et les plus courantes. Elles se caractérisent par leur simplicité, et demeurent ainsi très accessible à un large public. La plupart du temps elles consistent à méconnaitre les règles d'impositions afin de diminuer le montant total de la TVA dû au Trésor. La fraude peut ainsi consister à « l'omission » de déclaration d'opérations assujetties à la TVA afin de ne pas reverser la taxe123(*). Dans le langage commun il s'agit du travail « au noir». 90. La fraude peut aussi consister à profiter de l'existence de plusieurs taux de TVA, en sous-estimant les taux figurant sur les factures de ventes afin de minorer la TVA due au Trésor. En effet les entreprises effectuant des opérations soumises à des taux différents doivent déclarer les recettes qu'elles réalisent par catégorie de taux d'imposition. Le jeu de la fraude est alors d'utiliser l'existence de ces divers de taux de TVA de manière à ce qu'une opération soit imposée à un taux moindre que celui normalement applicable. Section 2 : Les fraudes à la TVA constituées par des circuits de fausses factures91. Les dispositions du CGI124(*) en matière de déduction permettent donc aux assujettis de d'imputer la taxe payée en amont sur la taxe reçue en aval. Cette déductibilité se matérialise par un crédit d'impôt de l'entreprise sur l'Etat. L'objectif des fraudeurs est d'utiliser les règles du droit à déduction afin d'accroitre un crédit de TVA existant ou de créer un montant de crédit de TVA de manière illégale. Pour cela, ils produisent parfois des factures fictives, ou bien des factures de complaisances. Il faut distinguer ces deux notions125(*). Dans l'hypothèse de la facture fictive, la livraison de bien ou la prestation de service n'a jamais eu lieu. La facture est fausse car elle mentionne une opération inexistante (Paragraphe 1). Dans la seconde hypothèse, celle de la facture de complaisance, la réalité de l'opération n'est pas contestée, mais le prestataire réel est un tiers, c'est à dire une personne autre que l'émetteur de la facture (Paragraphe 2). Dans ces cas de figure, la fraude ne consiste plus seulement à éluder l'impôt volontairement. Il s'agit pour les fraudeurs de s'enrichir en créant un crédit de taxe fictif aux dépens de l'Etat. C'est la nature même de la TVA permet le détournement de la taxe. 92. Le schéma de ces fraudes est très simple. Puisque la facture est le document fondamental pour pouvoir bénéficier du droit de déduire la TVA acquittée en amont, il suffit d'émettre une fausse facture pour créer au profit de l'acquéreur un crédit de taxe contre l'Etat équivalent au montant de la TVA figurant sur la facture. En effet la mention de la TVA sur une facture ouvre droit en principe chez ce dernier à une déduction d'égal montant. Quant à la créance fictive, le fournisseur impute ensuite son montant sur la taxe qu'il doit au Trésor, voire demande à l'Etat son remboursement. Paragraphe 1 : Les factures ne correspondant à aucune contrepartie : les « factures fictives »93. Les fausses factures qui ne correspondent à aucune exécution de prestation de service ou de livraisons de marchandises prennent le nom de factures fictives126(*). L'intérêt de ces fausses factures est de profiter du système de déduction afin de créer un faux crédit de TVA sur l'Etat qui pourra être liquidé soit en l'imputant sur la TVA exigible, soit en demandant son remboursement. Ce type de fraude se base sur un mécanisme ingénieux mais simple à appréhender (A). Un schéma est utile pour illustrer son fonctionnement (B) A> Le mécanisme de la fraude avec facture fictive94. Le mécanisme de la fraude à la TVA avec facture fictive exploite les failles propres à cet impôt. Il s'agit de produire une facture mentionnant la TVA mais qui n'a aucune contrepartie en terme livraison de bien ou prestation de service réellement effectuées. 95. Son mécanisme consiste à détourner le système des paiements fractionnés de la TVA qui repose sur l'établissement par l'assujetti de factures mentionnant le montant de la taxe dont il est redevable. Ces factures quand elles sont légales justifient de l'existence de la créance de TVA dont dispose l'acquéreur en raison de l'acquittement de la taxe d'amont. L'acquéreur peut ensuite déduire le montant de la taxe acquittée en amont du montant de la taxe exigible par l'Etat. L'intérêt de la fraude est alors de se procurer une facture fictive auprès d'un fournisseur. La technique permet de créer un crédit de TVA imaginaire entrainant la déduction ou le remboursement du montant de TVA indiquée sur la fausse facture d'achat. 96. Il faut préciser que ces émetteurs de fausses factures sont des sociétés dont la vie est éphémère, ce qui rend leur contrôle par l'administration très difficile127(*). Certain les considères d'ailleurs comme des sociétés « taxi », exerçant parfois une « véritable activité de marchand de taxe »128(*). Ils sont en vérité des hommes de pailles dont le seul rôle est d'émettre des factures purement fictives. 97. On peut citer pour exemple de facture fictive, la facture faisant figurer une taxe ne correspondant pas à des travaux effectivement réalisé129(*), ou la facture faisant état d'une taxe calculée sur des redevances ne correspondant à aucun service130(*). De même, une facture est fictive lorsque des vins qui avaient fait l'objet de factures d'achat établies au nom de l'acheteur n'avaient pas été revendu par lui ni ne figurait dans ses stocks131(*). * 122 Slim Besbes ; « La fraude fiscale en matière de TVA », mémoire de DEA en droit des affaires, 1990. p. 18. * 123 Slim Besbes ; « La fraude fiscale en matière de TVA », mémoire de DEA en droit des affaires, 1990 * 124 Art. 271 et s. du CGI * 125 P. Duvaux, « Factures de fraudeurs et droit à déduction de la TVA » BF 10/05, 01 septembre 2005 p. 689. * 126 C.David, O.Fouquet, B.Plagnet, P.-F.Racine ; Les grands arrêts de la jurisprudence fiscale, Dalloz, 5e édition. * 127 En effet, elles sont souvent dissoutes au jour de la découverte de leur activité frauduleuse par l'administration fiscale. * 128 M. Cozian et Fl. Deboissy; Précis de fiscalité des entreprises, préc. * 129 CE 28 février 1983, 26 584 et 27 709, SOFICO, RJF 1983.5.634. * 130 CE 22 juin 1983, 26 241, Labouchède, tuyauterie Rhône-Alpes, DF 1985.40.1646 * 131 CE 14 mars 1983, n° 24104, 7° et 8° s.-s : RJF 5/83 n°622. |
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